La narratrice qui a perdu son père, âgée d’un an, vit avec son souvenir jusqu’au jour où elle décide de s’intéresser à la courte vie de ce dernier, né dans les années 50, en Algérie, dans une riche famille juive, contrainte au rapatriement en France. La première partie du récit relate comment le père n’a su échapper à la petite colonie pénitentiaire familiale. La deuxième partie s’attarde sur elle, la narratrice, ses questionnements sur sa place dans cette famille et sa perte de repères. Dans un style froid, automnal et mélancolique comme Saturne, l’auteure dissèque le processus d’une naissance endeuillée à celle d’une autre naissance libérée. D’une manière très subtile et dans un rythme soutenu, l’évocation de la question du deuil ou de comment pouvons-nous avoir mal à nos aïeuls est abordée à travers le portrait de la narratrice en contrepoint de celui de son père : savoir perdre son père, attendre qu’il revienne et le rejoindre. Ce roman nous entraîne dans une bouleversante histoire qui débute comme un roman familial (eux, la famille, la prison, les apparences, le jeu, la simulation, les mensonges) se poursuit sous la forme d’une introspection (elle, son désespoir, sa plongée et sa remontée) et l’autopsie d’une dépression pour s’achever par une renaissance.