Barcelone, 11 septembre 1714. Suite à la mort de Charles II, la guerre fait rage entre les Bourbons et les Habsbourg pour la succession. A l’issu d’un siège d’une année, Barcelone tombe. Les Catalans assistent alors au massacre et au pillage de leur citadelle érigée par Vauban. Une décennie plus tard, Marti Zuvinia, alors en exil, rédige ses mémoires tout en donnant un récit tout à fait personnel du siège. C’est ainsi que s’ouvre Victus. A la fois roman historique et picaresque, la langue érudite de Sanchez Piñol nous embarque dans une monumentale fresque d’un épisode oublié du XVIIIe siècle. Il est aussi l'autobiographie d'un homme qui n'est ni vertueux, ni héroïque, mais un personnage dont le parcours se construit au hasard d'évènements tragiques. Il y a du Gil Blas de Santillane, du Don Quichotte : ses aventures souvent extravagantes se meuvent dans de caustiques tableaux de moeurs tout en nous offrant une radiographie de toutes les couches de la société barcelonaise de l’époque, où la plus noble n’est pas celle que l’on croit… Lyrique, poétique et burlesque, ce petit bijou de l’auteur de La Peau froide résonne comme un écho aux paroles rapportées par Tite-Live dans son Histoire Romaine : « Pugna magna victi sumus » (« Nous avons été vaincu dans une grande bataille »). Nous avons perdu, oui, mais avec dignité et élégance, faisant ainsi de Victus, sans nul doute, un des chefs-d’oeuvre de la littérature catalane contemporaine.