1975. Nora, la trentaine, découvre le journal et la correspondance de ses grands parents Jacob et Maroussia. Point de départ de cette saga familiale au titre biblique, le dernier roman de Ludmila Oulitskaia est vertigineux. Faisant tour à tour défiler le destin de Jacob, le grand-père relégué en Sibérie, Maroussia la grand-mère féministe, et Nora, scénographe vivant un amour impossible, l’auteure russe entremêle les époques, de la période tsariste au début du XXIe siècle, avec le récit généalogique où les destinées intimes s’entrelacent aux grandes figures historiques qu’elles soient politiques, scientifiques ou artistiques. Car il est bien question ici de récit généalogique, c’est en écrivant son histoire que celle-ci se fait chair, où les vivants et les morts dialoguent ensemble en un récit resserré au ton tantôt ironique, tantôt mélancolique. « Chaque être humain est un Texte » nous dit-on où l’on comprend rapidement que le texte de Nora n’est autre que la chair de l’auteure elle même. Magnifique parabole sur la vie, l’une des plus belles plumes russes de notre temps, nous livre ainsi sans conteste son roman le plus abouti, le plus personnel où le fantôme de Tolstoï hante ces pages.